En cette fin mars 2021, nous décidons de partir en Vanoise pour l'une des dernières randonnées de l'année. Notre objectif, la pointe de la Sana (3448m) par l'arête ouest. Valentin et Alexis ont étudié l'itinéraire, au programme 1615m de dénivelé positif et pas mal de kilomètres, il ne semble pas y avoir de grandes difficultés techniques à l’exception de quelques passages escarpés sur l'arête qui nécessiteront probablement crampons et piolet. Nous devons passer la nuit au refuge de la Leisse, mais ne sachant pas si il sera ouvert nous prenons la tente par précaution (incertitude Covidienne).
Malheureusement, la météo vient contrarier nos plans, ils annoncent de forts vents et de la neige à partir de samedi soir. Valentin (toujours (trop) motivé) compte nous faire faire l’ascension à la journée avant la tempête, ce qui me semble personnellement un peu ambitieux. Pour ne rien arranger nous partons un peu tard et la distance pour rejoindre le refuge s'avère assez longue. Après avoir rapidement avalé les premières pentes nous traversons de grandes étendus assez plates, de grands lacs gelés se succèdent et nous ne voyons pas le bout.
Il est déjà presque 16h quand nous apercevons enfin le refuge en contre-bas, on descend en espérant que la porte ne sera pas verrouillée. L'endroit est vraiment magnifique et isolé au milieu de ces montagnes. Fort heureusement le refuge est ouvert et cerise sur le gâteau, nous sommes seuls. Il y a même un poêle et une réserve de bois. Nous renonçons au sommet pour ce soir, il reste plus de 1000m de dénivelé, les autres décident quand même de partir faire un tour, je reste seul au chalet et prépare un feu pour faire fondre de la neige et nous réchauffer.
Le vent commence à se lever et je m'inquiète un peu de ne pas les voir revenir. Il arriverons finalement sous les premiers flocons. L'atmosphère est incroyable, on rentre un peu de bois pour le soir puis nous préparons la fondue autour d'une bière et d'un saucisson.
Au crépuscule, la tempête se lève, les volets claquent, les vents sont tellement puissants que la fumée du poêle reflue par le conduit et enfume toute la pièce, nous sommes contraints d'éteindre le feu et d'aérer malgré la fraicheur ambiante. Nous partons vite nous coucher dans nos duvets bien chauds, les murs du chalet vibrent de toutes parts et on est bien heureux de ne pas être sous la tente. Nous repensons avec humour à cet ancien pisteur rencontré au début de la randonnée qui nous annonçait des vents à 200km/h, nous ne l'avions pas pris au sérieux mais il semble finalement qu'il avait raison. On s'endort en espérant que le temps se calmera demain matin, le bulletin météo annonçait une accalmie entre 9h et 10h.
Le lendemain, je me lève fatigué, la nuit fut agitée régulièrement réveillé par les rafales. Le temps ne semble pas s'être amélioré, on déjeune et on décide de rentrer. Dehors le vent souffle et on ne voit pas à plus d'un mètre, on suit Théo qui lui même suit le signal GPS sur iPhiGéNie. L'itinéraire déjà parcouru hier ne présentait pas de réel danger, mais à l'aveugle tout est différent. De plus, il a bien neigé ce qui ne facilite pas notre progression, nous nous suivons en file indienne, à un moment Théo disparait brusquement, on le retrouve deux mètres plus bas dans la neige, il est tombé d'une corniche, plus de peur que de mal. On redouble maintenant de vigilance, on essaye de marcher au milieu du vallon pour limiter le risque en cas d'avalanche, on se souvient que les lacs étaient bordés de pentes assez raides. A cet instant nous ne faisons pas les malins. Alors que nous avançons bien, le téléphone de Théo s'éteint, on essaye alors de naviguer à vue, mais dans ce monde blanc nous n'avons que très peu de repères.
On finit par tomber sur un panneau indicatif, on souffle un peu il semble qu'on soit dans la bonne direction. On poursuit notre route et le téléphone finit par se rallumer, après de multiples hésitations, nous parvenons finalement à rejoindre les pistes heureux et frigorifiés.
Arrivés aux voitures, on se dit qu'on a été très chanceux et que l'histoire aurait pu finir autrement, cette expérience nous servira de leçon je pense. On est tous très heureux de rentrer chez nous au chaud.
































